Joséphine Javier

Les spéculations de la taille et de l’échelle déterminent notre rapport au monde ; en géographie, on peut comparer des étendues plus ou moins vastes qui correspondent à des découpes physiques ou administratives. Mais l’échelle suppose le passage d’une dimension à une autre, d’un espace physique à un espace mental, ou d’un espace réel à un espace de représentation.

Je pratique simultanément différents médiums comme le dessin, la peinture, l’installation, pour établir un mode  d’appréhension des formes dans une relation du proche et du lointain. Dans la pratique du dessin, ces projections fonctionnent parfois comme des objets autonomes en suspend, quand d’autres produisent un espace suggéré qui ouvre le regard. En fonction de la manière dont les formes s’articulent, de la façon dont j’aborde leurs découpes ou leurs segments, les temporalités qu’elles expriment ne sont pas les mêmes. 

Dans le domaine de la cartographie, le terme de discontinuité apparait pour indiquer des variations dans l’espace, ou bien des ruptures linéaires dans la description d’un phénomène. La perception d’une discontinuité varie en effet avec l’échelle à laquelle on la regarde et une rupture linéaire à petite échelle apparaît souvent à grande échelle comme une zone de transition. À travers ces projections qui parlent de l’étendue du regard, je dessine une géométrisation parfois forcée de l’espace en jouant avec les codes graphiques de l’objectivité géographique. Alors vient l’envie de rapatrier l’aspect du paysage du coté subjectif, de le verser dans l’intime et de faire dialoguer une oscillation des points de vue. Les signes qui permettent d’identifier une zone, un relief, un changement, se mélangent, créent des ensembles homogènes ou non, quand ailleurs de simples couches de crayon  se superposent.