Crescendo 2024

Crescendo est une plateforme de production, de valorisation, et d’insertion socio-professionnelle à l’attention de jeunes diplômés en arts plastiques. Le programme est soutenu par le Ministère de la Culture (France), dans le cadre de CulturePro 2022. Il bénéficie aussi du soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles et du WBI pour la Belgique. A Liège, l’opération a été mise sur pied au travers d’une collaboration entre l’Académie royale des Beaux-Arts et l’Ecole supérieure des Arts de Dunkerque.

Depuis 2022, Crescendo a permis d’accueillir dix-huit jeunes artistes en résidence aux RAVI.
En 2024, les RAVI ont accueilli 4 artistes dans le cadre de ce projet : Roman COMPIEGNE, Joséphine PERROT, Raphaël WU et Pénélope LIMOGES.

Roman COMPIEGNE

En résidence aux RAVI en mai 2024 dans le cadre de Crescendo

Roman Compiegne a inscrit sa résidence aux RAVI dans la foulée de ses recherches sur les rapports entre le son et l’image. Ses premières expérimentations étaient dévolues à l’adaptation d’éléments graphiques existants et souvent issus du monde numérique comme les code-barres. Il a mis au point des programmes informatiques pour les importer et les exploiter comme des partitions. Son séjour à Liège lui a permis de donner un prolongement plus plastique à ces travaux. Roman Compiegne s’est concentré sur l’exploitation musicale de ses dessins plutôt que sur la transposition d’objets trouvés. « Ma résidence à Liège a été un temps de recherche et de création. La question a été : ‘Comment dessiner en pensant à ce que cela va donner comme son ?’. Les formes ont rapidement évolué. Les premières partent d’un point focal et rayonnent en embranchements suivant des développements géométriques. Ensuite, les dessins deviennent plus organiques, proches des formes d’une racine ou de certains insectes. Aux RAVI, j’ai écrit un programme spécifique qui interprète les tracés en fréquences. Il permet aussi d’intégrer des bugs informatiques ainsi que des sons enregistrés, des percussions notamment, suivant une technique d’échantillonage. J’ai par ailleurs réfléchi au protocole de monstration de mon travail. Les dessins et les musiques ont une valeur autonome mais je tiens à ce qu’ils soient présentés ensemble. Je pense notamment à associer la diffusion sonore à un écran qui permette de suivre la lecture de la partition graphique. » PH

Joséphine PERROT

En résidence aux RAVI en mai 2024 dans le cadre du Projet Crescendo

Joséphine Perrot a mis sa résidence à profit pour poursuivre les recherches graphiques entamées durant ses études à l’Ecole Supérieure des Arts de la Ville de Liège qu’elle achève en 2023 dans l’option « Scénographie ». Elle en a conservé deux caractéristiques essentielles : d’une part, l’emploi du fusain parce que « noir, c’est noir » et parce que le travail laisse des mâchurations que l’artiste conserve ; un format en frise, d’autre part, lequel favorise les développements narratifs, une lecture « comme en travelling » et les associations hasardeuses d’images.

Le séjour aux RAVI lui a permis de faire évoluer le travail suivant plusieurs axes de recherche. Outre qu’offrir la possibilité d’employer des supports aux échelles plus importantes qu’à l’habitude, l’atelier a aussi été un lieu de mise à l’épreuve des résolutions stylistiques marquées par des modulations des noirs jusqu’alors posés en aplat. Mais surtout il a ouvert un champ d’expérimentations des pratiques d’installation. La grande frise « charbonnée » sur papier partage les mêmes motifs qu’une série de petites sculptures taillées dans la frigolite (parce que c’est un matériau simple, à portée de main) et glissées dans une résille textile noire et élastique fixée au mur. « L’iconographie entre nature morte et scène de genre touche au repas

de famille, explique Joséphine Perrot. Je mets en scène des objets et des animaux que le regardeur peut associer librement. Ils ont pour moi une valeur symbolique. J’y vois les figures de la cellule familiale traditionnelle : l’ourson, c’est l’enfant ; la baguette de pain, c’est le père. Je cherche encore pour la mère. On peut y lire une histoire ou des histoires comme il y en a dans beaucoup de familles avec les traumas qui s’y apparentent et qui s’y rejoignent. Je me suis aussi servie de papiers peints usagés pour la seule partie en couleur de mon installation. Fixés au mur, ils servent à poser un cadre : on se trouve dans un lieu précis, dans l’intérieur d’une cuisine ou d’une salle à manger. » PH

Raphaël WU

En résidence aux RAVI en juin 2024 dans le cadre du projet Crescendo

Raphaël Wu a consacré ses deux temps de résidence Crescendo à une suite de gravures au carborundum intitulée Fuyez !. A Dunkerque en mars 2024, il a produit l’ensemble des images d’après des photographies la plupart prises lors de voyages, tandis que son séjour aux RAVI a été dévolu à la mise au point des modalités de monstration. Ces dernières sont porteuses de sens : suivant une volonté de faire converger la forme et le fond, elles participent à la discrétion de la thématique des images qui, outre qu’être allusives, sont masquées par des claustras. « On les regarde mais on ne les voit pas », souligne l’artiste. Raphaël Wu explique encore que Fuyez ! est un hommage aux homosexuels en Chine, lesquelles subissent l’oppression des attentes de leur entourage, l’injustice de lois discriminatoires et la menace des « thérapies » de conversion. La plupart se trouvent contraints de dissimuler leur nature à l’abri d’unions de convenance, les « mariages coopératifs » empreints « d’un silence pesant, où les secrets se murmurent et les vérités se taisent » (RW). Les gravures de Raphael Wu s’attachent à la poésie qui naît de ce silence … une « poésie de la survie, de la résilience, de la beauté qui se faufile dans les interstices du destin ». PH

Pénélope LIMOGES